Article
paru dans le FRANCE-GUYANE du samedi 1er mars au mardi 4 mars 2003
La
flore guyanaise enfin protégée
83
espèces emblématiques de la Guyane française sont
désormais protégées des prélèvements
abusifs des collectionneurs ou de la déforestation.
La
liste des plantes protégées de Guyane
a été récemment commentée au « séminaire
international sur les plantes du plateau des Guyanes »,
tenu à l’IRD de Cayenne. 83
plantes rares, en danger ou pourvues d’importantes
ressources génétiques sont désormais interdites de
cueillette et de destruction. Les peines encourues vont de fortes amendes
à plusieurs mois de prison.
Des
espèces d’orchidée, de bois
de rose, d’ananas sauvage, de waï,
de mahots, de palmier à huile américain,
d’aristoloche font partie des 83 protégées
par l’arrêté ministériel qui date du 9 avril
2001.
Mardi
dernier, à l’IRD de Cayenne, dans le cadre du séminaire
du projet international « Flora of the Guyanas
», Jean-Jacques de Granville (conservateur de l’Herbier
de Guyane appartenant à l’IRD) et Sylvia Lochon,
responsable du service patrimoine naturel de la Diren (direction régionale
de l’environnement) ont décrit les différentes espèces
de cette liste rouge.
«
Il n’y avait aucune plante protégée en Guyane,
contrairement à d’autres DOM, explique Sylvia Lochon,
excepté le sabot de Vénus,
une grosse orchidée, inscrite sur l’annexe A de la Convention
de Washington. »
Il
a fallu trois ans pour établir cette liste. L’IRD et les
experts en botanique du CSRPN (Comité scientifique régional
du patrimoine naturel) ont dû tout d’abord faire un choix
parmi les 5 575 espèces répertoriées du plateau des
Guyanes et des 700 espèces caractéristiques du patrimoine
de la Guyane française.
Parmi
elles, la liste contient des espèces rares (présentes dans
moins de six localités) comme une espèce de palmier
épineux qu’on a trouvé uniquement
sur le Mont Grand Matoury, des espèces menacées comme une
orchidée jaune, très prisée par les collectionneurs
et présente sur le milieu très fragile de la savane-roche
des inselbergs ou des espèces
propres à un territoire délimité (endémiques)
comme une aristoloche ou
une broméliacée.
Certaines
espèces protégées renferment des ressources génétiques
importantes. Ces dernières « comme le palmier à
huile américain permettent de conserver certains caractères
sauvages afin de créer de nouvelles variétés résistantes
à des maladies, à des champignons» explique Sylvia
Lochon.
Commentaires
joints aux deux photos (non disponibles) illustrant l’article :
- Cyrtopodium andersonii,
la plus grande orchidée terrestre de Guyane.
Son inflorescence peut atteindre 1,5 mètres de hauteur et présente
de nombreuses fleurs jaunes de 2 à 3 cm de diamètre. C’est
une espèce très caractéristique des savanes-roches
des inselbergs. Même si elle est facile à cultiver,
sa protection est souhaitable compte tenu de la fragilité et la
richesse des habitats patrimoniaux que sont les inselbergs de Guyane.
- Aristolochia guianensis,
aristoloche rare et endémique du nord-ouest de la Guyane et du nord-est
du Surinam.
Connue uniquement de quatre stations en Guyane (dont Organabo, Saut-Sabbat,
Akarouany), elle est soumise à une forte pression humaine. |
Liste
des 83 espèces végétales protégées
en Guyane
Journal Officiel N°154
(page 10739)
Ptéridophytes
Actinostachys
pennula (Swartz) Hook.
Anemia pastinacaria Moritz & Prantl.
Ceratopteris pteridoides (Hooker) Hieronymus.
Isoetes schinzii H.P. Fuchs-Eckert.
Marsilea polycarpa Hook & Grev.
Ophioglossum nudicaule Linnaeus f.
Schizaea incurvata Schkuhr.
Phanérogames
- Angiospermes
Acioa
guianensis Aublet.
Ananas ananassoides (Baker) L.B. Smith - du groupe des
Ananas sauvages
Ananas parguazensis Camargo et L.B. Smith - du groupe
des Ananas sauvages
Aniba rosaeodora Ducke. Bois de rose
Antirhea triflora J.H. Kirkbride.
Araeococcus goeldiamus L.B. Smith.
Aristolochia guianensis O. Poncy.
Asterogyne guianense J.J. de Granville et A. Henderson.
Astrocaryum minus J.W.H. Trail.
Axonopus oiapocensis G.A. Black.
Axonopus passourae G.A Black.
Bactris nancibensis J.J. de Granville spec. nov. ined.
Bocoa viridiflora (Ducke) Cowan - du groupe du
Boco.
Bromelia granvillei L.B. Smith et E.J. Gouda - du groupe
des Ananas sauvages
Caladium schomburgkii Schott.
Calathea dilabens L. Andersson et H. Kennedy.
Calathea squarrosa L. Andersson et H. Kennedy.
Calliandra hymenaeoides (Persoon) Bentham.
Cereus hexagonus (Linnaeus) Miller.
Cleistes grandiflora (Aublet) Schlechter.
Cissus duarteana J. Cambessèdes.
Cornutia pubescens G.F. Gaertner.
Coryanthes macrantha (W.J. Hooker) W.J. Hooker
Costus curcumoides P.J.M. Maas - du groupe des
Cannes congo
Coussarea hallei J.A. Stevermark.
Crudia tomentosa (Aublet) Macbride.
Cyrtopodium andersonii (Lambert ex Andrews) R. Brown.
Cyrtopodium cristatum Lindley.
Drosera cayennensis P.A. Sagot ex Diels.
Elaeis oleifera (Kunth) Cortes - Palmier
à huile américain
Eleocharis sellowiana Kunth var. Homogyna (Steudel) H. Pfeiffer
Eriocaulon guianense Körnicke.
Eschweilera squamata S.A. Mori - du
groupe des Mahots.
Esenbeckia cowanii R.C. Kaastra.
Ficus cremersii C.C. Berg - du groupe
des Figuiers
Furcraea foetida (Linnaeus) A.H. Haworth.
Galeandra styllomisantha (Velloso) Hoehne.
Genlisea pygmaea A. de Saint-Hilaire.
Geonoma fusca Wessels Boer - du groupe
des Waï
Habenaria leprieurii Reichenbach f.
Habenaria longicauda W.J. Hooker.
Habenaria platydactyla Kraenzlin.
Habenaria pratensis (Lindley) Reichenbach f.
Heliconia dasyantha Koch et Bouché.
Himatanthus drasticus (C.F.P. Martius) M. Plumel
- Bois lait.
Justicia laevilinguis (Nees von Esenbeck) Lindau.
Leandra cremersii J.J. Wurdack.
Lecythis pneumatophora S.A. Mori - du
groupe des Mahots
Lembocarpus amoenus A.J.M. Leeuwenberg.
Miconia francavillana A. Cogniaux.
Octomeria sarthouae Luer.
Oncidium lanceanum Lindley.
Ossaea coarctiflora J.J. Wurdack.
Ouratea cardiosperma (A.P. de Candolle) Engler - du
groupe des Malmanis
Pachira dolichocalyx A. Robyns.
Passiflora foetida Linnaeus var. moritziana (Planchon ex
Triana et Planchon) Killip.
Peperomia gracieana A.R.A. Görts-van Rijn.
Petrea sulphura M.J. Jansen-Jacobs.
Phragmipedium lindleyanum (Schomburgk) Rolfe.
Pilea tabularis C.C. Berg.
Pitcairnia geyskesii L.B. Smith - du groupe des Ananas
sauvages
Pitcairnia sastrei L.B. Smith et R.V. Read.
Polygala variabilis Kunth.
Psychotria granvillei J.A. Steyermark.
Psychopsis papilio (Lindley) H.G. Jones.
Rhabdadenia macrostoma (Bentham) Müller-Argoviensis.
Rudgea oldemanii J.A. Steyemark.
Schistostemon sylvaticum D. Sabatier.
Simaba morettii C. Feuillet.
Stifftia cayennensis H. Robinson & R. King.
Stachytarpheta angustifolia (Miller) M. Vahl.
Swartzia leblondii R.S. Cowan.
Trigonia hypoleuca Grisebach.
Turnera rupestris Aublet.
Vochysia sabatieri L. Marcano-Berti.
Websteria confervoides (Poiret) S. Hooper.
J.O.
Numéro 154 du 5 Juillet 2001
Textes généraux
Ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement
Arrêté du
9 avril 2001 relatif à la liste des espèces végétales
protégées en région Guyane
NOR
: ATE 0100107A
Le
ministre de l'agriculture et de la pêche et la ministre de l'aménagement
du territoire et de l'environnement,
Vu le livre IV du code de l'environnement, notamment ses articles L;
411-1 et L. 411-2;
Vu l'arrêté du 20 janvier 1982 modifié relatif à
la liste des espèces végétales protégées
sur l'ensemble du territoire national;
Vu l'avis du Conseil national de la protection de la nature,
Arrêtent
:
Art.
1er - Afin
de prévenir la disparition d'espèces végétales
menacées et de permettre la conservation des biotopes correspondants,
ont interdits, en tout temps, sur le territoire de la région
Guyane, la destruction, la coupe, la mutilation, l'arrachage, la cueillette
ou l'enlèvement, le colportage, l'utilisation, la mise en vente,
la vente ou l'achat de végétaux des espèces ci-après
énumérées.
Toutefois, les interdictions de destruction, de coupe, de mutilation
et d'arrachage ne sont pas applicables aux pérations d'exploitation
courante des parcelles habituellement cultivées.
Art. 2. -
La directrice
de la nature et des paysages et la directrice générale
de l'alimentation sont chargées, chacune en ce qui la concerne,
de l'exécution du présent arrêté, qui sera
publié au Journal officiel de la République française.
Fait
à Paris, le 9 avril 2001.
La
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement,
Pour la ministre et par délégation:
La directrice de la nature et des paysages,
C. Barret
Le
ministre de l'agriculture et de la pêche,
Pour le ministre et par délégation:
La directrice générale de l'alimentation,
C. Geslain-Lanéelle
Remarque:
l'espèce protégée
est désignée par son nom latin, le nom commun n'est mis
qu'à titre indicatif car il désigne souvent différentes
espèces qui se ressemblent.
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de Page
|
La
liste des 83 espèces protégées est disponible à
la Diren, à l’Herbier de Guyane, au Service de protection
des végétaux et sur le Journal officiel de juillet 2001.
Une plaquette sur le bois de rose sera disponible ces jours-ci, décrivant certaines espèces
protégées de cette famille. Enfin, une affiche avec tous
le détails des différentes espèces protégées
sera réalisée à la fin de l’année.
Le but de cette liste est surtout de « protéger ces plantes
des collectionneurs et de leurs prélèvements abusifs, notamment
sur des milieux très fragiles. Sans ça, ces plantes disparaîtront
» soutient Sylvia Lochon.
Sous peine de fortes amendes voire de plusieurs mois de prison, l’arrêté
ministériel interdit donc de les détruire, les couper, les
mutiler, les arracher, les cueillir, les enlever, les colporter, les utiliser,
les mettre en vente, les vendre, les acheter. Sauf lors d’opérations
d’exploitation des parcelles habituellement cultivées, où
l’arrachage et la coupe sont permis. « En souhaitant qu’elles
puissent dans la mesure du possible être replantées autre
part » propose Sylvia Lochon.
Trois
questions à : Jean-Jacques
de Granville,
conservateur de l’herbier de Guyane, IRD
(Propos recueillis par Benoît Fernandes).
« Faire un recensement complet de la flore guyanaise»
Le séminaire international du projet « Flora of the Guyanas
» se déroule tous les deux ans dans différentes villes.
C’est la deuxième fois depuis 1984 qu’il a lieu à
Cayenne. Jean-Jacques de Granville rappelle l’intérêt
du projet « Flora of the Guyanas »
France-Guyane : Pourquoi ce projet fut-il mis en place ?
Jean-Jacques de Granville : Nous n’avions aucun ouvrage complet
qui recensait la flore guyanaise. Les seuls qui existaient dataient du
19e siècle. En 1984, plusieurs instituts internationaux, sous l’égide
de l’Université hollandaise d’Utrecht, se sont réunis
pour faire un recensement complet des espèces végétales,
plantes ornementales, alimentaires, arbres, fougères… que
comptent les trois Guyanes : Le Guyana, le Surinam et la Guyane française.
§ France-Guyane : Comment se déroule la coopération
?
Jean-Jacques de Granville : Nous nous réunissons tous les deux
ans dans diverses villes. Nous faisons alors un point sur le recensement
et la classification des espèces, sur les recherches entreprises,
etc.
Nous éditons également plusieurs fascicules recensant les
espèces nouvellement décrite. Dans quelques jours, le deuxième
des trois tomes du livre (en langue anglaise) : « Guides des plantes
vasculaires du centre de la Guyane française » sera disponible.
Réalisé par Scott A. Mori, du Jardin Botanique de New-York,
il établit une flore complète de notre région.
§ France-Guyane : Comment avance le projet ?
Jean-Jacques de Granville : Cela avance lentement. Nous n’avons
pour l’instant publié qu’un tiers des famille présentes
en Guyane.
Mais ces ouvrages et ces recherches ont pour but de mieux connaître
notre environnement afin de le protéger et l’aménager
dans les meilleurs conditions de préservation de la flore et de
la faune de la Guyane. |